Communiqué de presse.

Pour les humanistes, une situation dans laquelle les intérêts commerciaux renforcent les inégalités est impossible.

En décembre 2020, l’Inde et l’Afrique du Sud ont fédéré un groupe d’une soixantaine de pays du Sud au sein de l’Organisation mondiale du commerce pour demander la suppression des brevets sur les vaccins Covid-19. L’industrie pharmaceutique y est opposée. Hier, un pays leader européen comme l’Allemagne a même réprimandé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, pour avoir voulu ouvrir le débat sur la question.

D’une façon générale, les brevets sont sans aucun doute nécessaires pour affiner l’innovation dans l’industrie pharmaceutique: ils protègent la propriété intellectuelle sur les inventions pendant (généralement) vingt ans. Le développement de nouveaux médicaments prend du temps (en moyenne environ 12 ans) et nécessite des investissements importants. Une période raisonnable de validité des brevets est donc nécessaire pour parvenir à un équilibre coûts-avantages favorable. DeMens.nu et le Centre d’Action Laïque ne prennent donc pas ici de position générale sur la question de savoir si cette période de validité peut généralement être considérée comme raisonnable (même en période non corona, il y a beaucoup de critiques pertinentes des accords ADPIC de l’OMC dans lequel les accords internationaux sur les brevets ont été établis).

Cependant, les arguments pour lever les brevets en particulier sur les vaccins Covid-19 sont décisifs et concernent la justice mondiale. Il y a la question de l’accès équitable aux bénéfices des nouvelles technologies, vital dans ce cas de pandémie mondiale. Les pays riches peuvent s’acheter cet accès. En revanche, les vaccins atteignent les pays du Sud lentement et de manière inadéquate. Les tragédies humaines en Inde, en Equateur, au Brésil… peuvent être suivies sur nos écrans. Il y a aussi des zones entières où cette calamité est subie silencieusement par la population, cachée par leurs gouvernements. La suppression des brevets permettrait d’augmenter les possibilités de production (un goulot d’étranglement étroit) dans le Sud. Cela nécessite bien plus que la simple levée des brevets: une aide à la production effective est également indiquée.

Dans ce cas, l’industrie pharmaceutique soutient également à tort que les brevets sont nécessaires pour obtenir une juste compensation des efforts consentis. Les coûts de développement de la technologie ont été largement supportés par les instituts de recherche publics, et les gouvernements ont acheté bien plus que les doses nécessaires avant même l’arrivée des produits. Il n’y avait aucun risque de marché pour ces vaccins.

L’argument classique de l’industrie pharmaceutique n’est donc pas valable ici. L’innovation ne s’est pas concrétisée grâce à la protection par brevet et le rapport coût-bénéfice était positif avant que le premier vaccin ne sorte des chaînes de production. En outre, la tarification de ces vaccins (avec une multiplication des prix prévue dans un proche avenir) n’est pas conforme aux mécanismes habituels du marché. On ne peut pas vraiment refuser un prix (trop) élevé alors que tant de vies en dépendent. C’est, pour reprendre l’expression d’un film bien connu, “an offer you can’t refuse”.

Enfin, il y a aussi un argument jouant en faveur du retrait des brevets: tant que tout le monde n’est pas protégé, personne n’est protégé, selon l’OMS. Si nous voulons nous protéger, nous devons travailler à la vaccination de la population mondiale. La mobilité mondiale continuera à fournir de nouvelles variantes du virus ou nous nous déplacerons nous-mêmes vers ces sources d’infection. Nous devons donner le vaccin à chaque personne pour nous protéger.

Le Centre d’Action Laïque et deMens.nu demandent dès lors que l’Union européenne soutienne la proposition de l’Inde et de l’Afrique du Sud. Levons les obstacles afin que les pays puissent produire en toute sécurité les vaccins et qu’ils soient accessibles pour le plus grand nombre.

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